Un état des lieux alarmant sur l’impact de la santé mentale au travail montre « qu’en 2019, 15 % des adultes en âge de travailler souffraient d’un trouble mental » [1]. Suite à de nombreux constats de ce genre, la Journée Mondiale de la santé mentale, célébrée chaque 10 octobre, a été instaurée dans l’objectif de sensibiliser et d’éduquer la population à ce problème. Entre les ravages de la crise Covid, une nouvelle organisation du travail, un contexte inflationniste et une recherche de sens, comment s’assurer du bien-être de ses collaborateurs ?

Définition de la santé mentale

Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), « la santé mentale correspond à un état de bien-être mental qui nous permet d’affronter les sources de stress de la vie, de réaliser notre potentiel, de bien apprendre et de bien travailler, et de contribuer à la vie de la communauté. Elle fait partie intégrante de la santé et du bien-être, sur lesquels reposent nos capacités individuelles et collectives à prendre des décisions, à nouer des relations et à bâtir le monde dans lequel nous vivons. La santé mentale est déterminée par de nombreux facteurs : socio-économiques, biologiques et environnementaux, dont l’environnement de travail. Les conditions de travail sont en effet un déterminant important de la santé mentale. »

Ce lien entre santé mentale et travail est indiscutable :

    • 41% des salariés sont en détresse psychologique
    • 2.5 millions sont en burn out sévère
    • 43% estiment que leur entreprise ne prend pas assez en compte les situations de souffrance psychologique qu’ils traversent
    • 36% estiment que leur travail a un impact négatif sur leur santé

Malgré ces chiffres préoccupants, le travail peut jouer un rôle bénéfique dans la santé mentale. Il donne un but, une mission et contribue à renforcer l’estime de soi et le sentiment d’être utile. Selon Maëlezig Bigi , « ce qui met le travail au cœur de la construction sociale, c’est qu’il s’est construit au travers d’une triple promesse de s’intégrer socialement, de s’intégrer économiquement et de s’épanouir individuellement ». Les personnes frappées par une tragédie citent régulièrement le travail comme un facteur clé de succès dans leur démarche de reconstruction personnelle.

NDLR : nous vous recommandons la lecture de l’article « La revendication du sens au travail », paru le 29 septembre 2022 sur le site Thot Cursus, qui propose une vraie discussion sur le sujet.

Mais parce que notre vie professionnelle connaît elle aussi des hauts et des bas, il est important de pouvoir identifier les risques pour sa santé, physique et mentale, et de se faire accompagner par son entreprise et les acteurs appropriés : médecine du travail, institutions, conseil légal, etc. [2]

Santé, maladie, handicap mental : entre mots et maux

Il est aussi important de maîtriser les différents termes et de ne pas confondre santé mentale, maladie mentale et handicap mental, par exemple. Nous avons défini la santé mentale plus haut.

⇒ Une maladie mentale, ou trouble mental, toujours selon l’OMS, « se caractérise par une altération majeure, sur le plan clinique, de l’état cognitif, de la régulation des émotions ou du comportement d’un individu. Il s’accompagne généralement d’un sentiment de détresse ou de déficiences fonctionnelles dans des domaines importants ». En 2019, 970 millions de personnes dans le monde présentaient un trouble mental [3].

⇒ Le handicap mental est « la conséquence d’une déficience dans le fonctionnement psychique, c’est-à-dire d’une limitation importante, durable ou définitive des fonctions mentales (cognition, jugement, intelligence, mémoire, émotions). Cette déficience peut être congénitale mais elle peut également être acquise à la suite d’une maladie, d’un accident ou du vieillissement » [4].

Une maladie mentale ne définit donc pas une bonne ou mauvaise santé mentale. En effet, « on peut avoir une mauvaise santé mentale sans présenter de maladie, de même qu’il est possible d’être en bonne santé mentale tout en souffrant d’une maladie mentale. » [5].

Risques psychosociaux (RPS) : de quoi parle-t-on ?

Selon le Ministère du Travail, du Plein Emploi et de l’Insertion, les risques psychosociaux (RPS) sont définis comme « des risques pour la santé physique et mentale des travailleurs provenant des conditions d’emploi, de l’organisation du travail et des relations au travail ».

Les risques psychosociaux peuvent être regroupés en 6 catégories :

    1. Exigences au travail
    2. Exigences émotionnelles
    3. Manque d’autonomie et de marge de manœuvre
    4. Mauvais rapports sociaux et relations de travail
    5. Conflits de valeur et qualité empêchée
    6. Insécurité de la situation de travail

S’ils ne sont pas identifiés, communiqués et prévenus, les risques psychosociaux suivront l’exemple du cordyceps, ce champignon au cœur de l’intrigue du jeu et de la série « The Last of Us » : ils se multiplient, se propagent d’individu en individu pour finalement éclater, déshumaniser leurs hôtes et mettre le collectif à genoux. Nos mots sont forts mais, selon les individus, leur histoire, leur caractère, leur situation… ce fléau peut se manifester sous différentes formes parfois difficiles à reconnaître, souvent délicates à aborder et toujours lourdes à résoudre.

  • Burnout : le salarié est « au bout du rouleau ».

Aussi appelé « syndrome d’épuisement professionnel », le burnout est un processus de dégradation du rapport subjectif au travail à travers trois dimensions : l’épuisement émotionnel, le cynisme vis-à-vis du travail et la diminution de l’accomplissement personnel au travail.

Alors que 2.5 millions de salariés sont en état de burnout sévère [10], il n’est pas présumé maladie professionnelle et il appartient au salarié d’apporter la preuve du lien de causalité entre sa situation et les conditions d’exercice de son travail.

  • Bore out – Lesalarié est au point mort.

Syndrome d’épuisement par l’ennui, le bore out caractérise la perte d’intérêt à réaliser son travail, causée par une sous-charge durable, des missions peu stimulantes ou l’absence d’objectifs. Le salarié se désengage et peut passer en situation de quiet quitting [6].

  • Brown out – Le salarié ne sait plus « ce qu’il fait là ».

Désignant en anglais une baisse de tension d’un appareil électrique, le terme désigne une perte de sens nourrie par des conflits de valeurs, un micromanagement étouffant ou des missions sans valeur ajoutée. L’employé ne retrouve plus ses leviers de motivation et accomplit ses tâches mécaniquement sans réellement se préoccuper de la qualité du livrable. Le brown out est intimement lié au concept des « bullshit jobs« .

  • Dépression – Le salarié est en danger

Se caractérisant par une tristesse persistance et un manque d’intérêt ou de plaisir pour des activités auparavant enrichissantes ou agréables, la dépression peut aussi se traduire par un manque de sommeil et d’appétit, une fatigue et des difficultés de concentration.

La dépression est un trouble, ou maladie mentale, qui touche 5% des adultes dans le monde et est une des principales causes de handicap. Ce n’est pas une simple tristesse passagère mais une réelle condition médicale qui demande d’être diagnostiquée et traitée.

Les études sur ces sujets se multiplient, la parole se libère et les termes rentrent dans les discussions courantes. C’est une excellente chose. Pour continuer à sensibiliser et à lutter contre la stigmatisation des personnes qui se retrouvent dans ces situations, il est important de comprendre qu’elles ne s’y complaisent pas, qu’elles ne prennent pas satisfaction à se désengager et qu’elles souhaitent y remédier. Cela demande, aux managers comme aux collègues de reconnaître les situations à risque, de repérer les signes avant-coureurs, d’oser ouvrir la discussion, d’être réellement à l’écoute et de prendre des actions pour améliorer la situation.

Source : Lydia HK – Coach, Consultante & Formatrice

Santé mentale : un coût pour les entreprises

« 12 milliards de journées de travail sont perdues chaque année pour cause de dépression ou d’anxiété »

Le bien-être mental des salariés a des conséquences bien réelles sur les performances de l’entreprise. La bonne nouvelle est que de nombreux troubles peuvent être soignés si la personne est prise en charge et accompagnée. « Pourtant, entre 50 et 70% des personnes concernées ne reçoivent aucune aide au travail. » [7] Ce manque d’aide entraîne des journées d’absence ou encore un désengagement des collaborateurs. Il a été estimé que ces journées d’absence coûtent mille milliards de dollars à l’économie mondiale.

Lorsqu’un employé présente un état de détresse psychique, il n’est plus capable d’exprimer son potentiel, et ses collaborateurs, par simple empathie ou par frustration des conséquences opérationnelles, peuvent aussi être affectés par la situation. Les équipes managériales ont un rôle à jouer dans la prise en charge de ce sujet sensible et dans la mise en place et l’entretien d’un cadre bienveillant pour tous.

D’autre part, il est souvent plus difficile pour les personnes souffrant de troubles mentaux d’accéder au marché de l’emploi, de profiter de conditions de travail adaptées à leurs besoins et d’être bien accompagnées. L’OMS préconise plusieurs actions pour garantir leur bonne inclusion, comme des aménagements du poste de travail ou des horaires, des délais supplémentaires selon les conditions de la mission, la nomination d’un Référent handicap, etc.

Une pandémie qui bouscule le quotidien …

Personne n’était préparé à affronter la crise Covid. L’OMS a déclaré qu’elle avait causé « une augmentation de 25 % de l’anxiété générale et de la dépression dans le monde » [8]. De plus, dans son Atlas de la santé mentale, l’OMS a indiqué que seulement 35% des pays ont des programmes liés à la prévention de la santé mentale au travail. Santé Public France a réalisé une synthèse de trois enquêtes menées en 2020 pour mesurer l’impact du Covid sur la santé mentale des travailleurs. Il en ressort que 30,5% des individus expriment des symptômes d’anxiété ou des troubles de sommeil [9].

La pandémie a ébranlé notre organisation du travail. Le lieu de vie est devenu pour beaucoup le lieu de travail, sans nécessairement pouvoir jouir d’un espace dédié, créant de l’inconfort, bousculant les rythmes et brouillant les frontières entre professionnel et personnel. Cette généralisation du télétravail et la digitalisation toujours plus rapide de nos communications contribuent aussi à un sentiment d’isolement. Les entreprises ont dû s’adapter dans l’urgence, tirent les leçons de ce qu’elles ont traversé et imaginent aujourd’hui les nouvelles formes d’organisations, posant chacune leurs nouveaux enjeux.

Selon une enquête de l’ANDRH rendue publique le 13 mars 2023 : « Sur un panel de 500 DRH, 84% jugent nécessaire de réformer le volet télétravail du Code du travail dans le sens d’une simplification du suivi du temps de travail, d’une clarification du rôle de l’employeur en matière de santé et de sécurité en télétravail. 55% souhaitent, quant à eux, l’élaboration de la notion de ‘’responsabilité partagée’’. »

Santé mentale au travail : des solutions concrètes

 

  • Mettre en place une politique QVCT : instaurer une charte de règles et de valeurs à respecter dans le but de prévenir les risques et assurer la sécurité des employés face aux risques psychosociaux. Etablir un cadre de travail bienveillant qui fasse preuve de flexibilité.
  • Faire intervenir des professionnels pour promouvoir le bien-être mental et informer sur les risques des troubles mentaux. L’OMS préconise aussi les interventions organisationnelles qui « consistent à évaluer les risques pour la santé mentale sur le lieu de travail, puis à les atténuer, les modifier ou les éliminer. »
  • Proposer à vos salariés une mutuelle couvrant les dépenses de santé mentale, de consulter un psychologue du travail ou de faire un bilan de santé mentale.
  • Former un ou plusieurs manager responsables du bien-être de l’équipe sur le lieu de travail. Il est en charge de repérer les comportements des personnes présentant des risques psychosociaux, entrer en contact avec elles et s’assurer de trouver une solution pour leur venir en aide. Pour l’ensemble de l’équipe, il peut choisir de mettre en place des ateliers de sensibilisation et de faire venir des intervenants professionnels pour qu’ils expliquent les risques, les conséquences et les solutions existantes.
  • Des ateliers de sensibilisation et des formations : une activité en équipe peut être un bon moyen d’illustrer les propos d’un intervenant et peut permettre de libérer la parole. En étant bien informés, vos collaborateurs seront plus facilement en mesure d’identifier leurs sources de stress et d’opter pour une solution adaptée à leurs besoins.
  • Mettre en place des temps de célébrations et de remerciements en équipe pour reconnaître à leur juste valeur l’implication de l’équipe et le travail accompli. La reconnaissance est un levier de motivation intrinsèque très puissant.

Vigie – En collaboration avec Ariane Conseil, Collock a mis au point un jeu de sensibilisation au burnout. Cette expérience ludique vous aidera à comprendre les raisons et les conséquences du burnout, identifier les situations à risques et adopter les bons gestes. Chaque session de jeu est suivie d’un débrief animé par un expert du sujet pour revenir sur les temps forts, les messages clés et répondre aux questions des participants.

Dans le quotidien au bureau, il est important d’instaurer des temps informels pour se ressourcer, retrouver ses leviers de motivation et digérer les événements qu’ils soient positifs ou négatifs.

      • Ne pas hésiter à prendre des pauses régulières pour se dégourdir les jambes, discuter avec un collègue, boire un café ou prendre l’air.
      • Ne pas négliger le déjeuner. Il permet de faire une vraie pause et de recharger les batteries, d’autant plus quand l’emploi du temps est bien rempli !
      • Prioriser ses tâches : urgentes, prioritaires, nice-to-have, etc.
      • Apprendre à solliciter de l’aide et à oser dire qu’on ne sait pas.

Les problèmes liés à la santé mentale au travail touchent de plus en plus de personne et la crise du Covid est venue bousculer nos modes de vie et de travail. Individuellement, il est important de savoir reconnaître une situation de surcharge physique ou émotionnelle et de savoir demander de l’aide aux bonnes personnes. Le monde professionnel continue de se réinventer et prend conscience de l’importance d’une bonne qualité de vie et des conditions de travail (QVCT). En tant qu’entreprise, il faut prendre en main la responsabilité du bien-être des collaborateurs, établir une véritable stratégie qui se décline en un ensemble d’actions concrètes, pérennes et cohérentes. N’hésitez pas à consulter les sources pour approfondir votre recherche !

Santé mentale au travail : 5 ressources pour approfondir

 

1. Ministère du Travail : Le site web du Ministère du Travail offre des informations et des conseils pour les employeurs et les travailleurs sur la prévention des risques psychosociaux et la promotion de la santé mentale en milieu professionnel.

2. INRS : Ce site web de l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles fournit des informations et des outils pour la prévention des risques psychosociaux au travail.

3. ANACT : Ce site web de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail propose des fiches pratiques et des guides pour la promotion de la santé mentale en milieu professionnel, notamment sur les risques psychosociaux et la QVCT.

4. Santé Mentale France : Le site web est un portail d’information sur la santé mentale en France. Il propose une variété de ressources, dont des publications payantes, pour les personnes concernées par les troubles psychiques, ainsi que pour les professionnels de santé mentale et les aidants.

5. Cahier de tendances RH 2023 : Le document de Parlons RH est un guide qui explore les tendances à venir dans le monde du travail en France pour l’année 2023. Il aborde des sujets tels que l’impact de la technologie sur le travail, l’importance de la diversité et de l’inclusion, les changements dans les modes de travail et la formation, ainsi que les enjeux de la santé mentale au travail.

Sources :

  1. La santé mentale au travail – Organisation Mondiale de la Santé, Septembre 2022
  2. La santé mentale et le travail – Psycom, Mars 2023
  3. Troubles mentaux – Organisation Mondiale de la Santé, Juin 2022
  4. Troubles et maladies – Plateforme de Concertation en Santé Mentale de la Province de Luxembourg
  5. La santé mentale au travail : raisons de son importance et soutien disponible – BetterUp, Mai 2022
  6. Bore-out, Burn-out et Covid – Préventica, Mars 2021
  7. La santé mentale au travail : nouvel enjeu des RH – EDHEC, Février 2022
  8. L’OMS et l’OIT appellent à de nouvelles mesures pour s’attaquer aux problèmes de santé mentale au travail – Organisation Internationale du Travail, Septembre 2022
  9. Impact de l’épidémie de COVID-19 sur la santé mentale des travailleurs et leurs comportements addictifs pendant le confinement – Santé Publique France, Janvier 2023
  10. Cahier de tendances RH 2023 – Parlons RH, Janvier 2023

À propos de Collock

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